Aurélien Deixonne est un étudiant en Master 2 Achats & Supply Chain à Toulouse Business School (TBS). Il a effectué un stage de césure de six mois au sein de Mitsubishi FUSO au Japon. Pour le sixième article de notre série « Parole de stage », nous l’avons rencontré pour vous faire partager son expérience.
Ton école et ta voie d’admission ?
Originaire du Béarn, j’ai obtenu un DUT Gestion des Entreprises et des Administrations (GEA) au sein de l’IUT Montesquieu 4 à Bordeaux. Par la suite, j’ai passé les concours d’Admissions Sur Titre (AST) et j’ai choisi de rejoindre Toulouse Business School pour l’ambiance, la qualité du programme et leur Junior-Entreprise (ESCadrille Toulouse Junior Conseil).
Pourquoi cette spécialisation ?
Je me suis spécialisé en Achats & Supply Chain lors de mon Master 1 et j’ai continué en M2. Depuis le lycée, je souhaite être entrepreneur, j’ai donc axé toute ma scolarité post-bac autour de cela. Ayant de bonnes connaissances en contrôle de gestion et comptabilité suite à mon DUT, j’ai pu développer mes compétences en marketing et en développement commercial en rejoignant ESCadrille. Il me manquait alors l’aspect Supply Chain/Achats pour connaître et comprendre toute la chaîne de valeur d’une entreprise.
Peux-tu présenter l’entreprise ?
J’ai réalisé un stage de six mois au sein de Mitsubishi FUSO Truck and Bus Corporation, détenu à 90 % par Daimler AG (Mercedes-Benz, Bharat…) et à 10 % par Mitsubishi. Mitsubishi FUSO est un constructeur japonais de poids lourds et d’autobus. Ils sont apparus dans la presse il y a peu en dévoilant leur camion électrique « e-canter ». J’étais assistant du Senior Procurement Manager en charge des châssis et de l’ « aftersales ».
Qu’est-ce qui t’a attiré dans cette entreprise pour ton stage ?
En effectuant ce stage au Japon, je savais que j’allais découvrir une nouvelle culture tant sur le plan personnel que professionnel. Mitsubishi FUSO avait certes été racheté par une entreprise européenne mais la majorité de ses employés étaient japonais. Cette diversité culturelle m’attirait fortement. De plus, il s’agissait d’un grand groupe qui exportait au niveau international : si vous prenez le temps de regarder les camions en France, vous verrez qu’il y a bien plus de camions Mitsubishi que ce que l’on pense !
Le processus de recrutement ?
Pour être franc avec vous, je ne suis pas passé par le processus de recrutement classique. En effet, depuis mon expérience commerciale chez ESCadrille, je me suis rendu compte du nombre d’opportunités qui s’ouvrent à vous si vous osez contacter directement le top management. Je ne pouvais pas appeler le Japon pour contacter les managers, j’ai donc préféré utiliser LinkedIn et sa version premium : Sales Navigator. Cela permet de trouver des « prospects » selon la région/le type d’entreprise/le poste et autres critères de précision. J’ai donc appliqué les méthodes de développement commercial destinées à décrocher des rendez-vous à ma recherche de stage pour obtenir un entretien !
Pour ceux qui l’ignorent, il y a un mois gratuit sur LinkedIn Premium sans engagement. Si cela vous intéresse, j’ai écrit un tutoriel sur LinkedIn sur les méthodes « directes », pour avoir un contact immédiat avec la personne ciblée, quel que soit son poste.
J’ai donc envoyé mon CV via LinkedIn aux personnes travaillant dans les achats avec une proposition de rendez-vous sur Skype.
J’ai ainsi été contacté par un manager de l’entreprise pour un entretien. À cinq heures du matin (décalage horaire de sept heures), j’entamais une discussion d’une heure en anglais avec deux managers japonais du service achats. Par la suite, j’ai reçu un mail de confirmation de la RH qui m’expliquait les futures étapes pour l’obtention du visa.
En effet, cela prend entre trois et quatre mois, donc prévoyez assez de temps ! De plus, il y a beaucoup d’étapes administratives, j’ai eu la chance d’être bien aidé par TBS pour toutes ces formalités. Notre service de stage prend des nouvelles régulièrement quand on est sur place, pour vérifier que tout se passe bien !
Comment occupais-tu tes journées ?
J’ai intégré le département Procurement et la team Châssis et Aftersales. Rattaché au top management, j’étais chargé de mettre en place des Key Performance Indicators pour évaluer la performance des différentes équipes. Il fallait donc, à partir des datas brutes que je recevais, les transformer en un dashboard précis et rapide à comprendre par mon manager. Objectif : obtenir des KPI lui permettant de manager au mieux ses équipes.
J’ai aussi fait des missions davantage orientées « pur achat » : évaluation et sélection de fournisseurs, recherche de « savings » dans les produits actuellement achetés, optimisation des processus de production chez le fournisseur…
Ce stage nécessitait d’avoir de bonnes bases sur le Pack Office, et plus particulièrement sur VBA (programmation via Excel). Ce fut une occasion en or pour moi de comprendre totalement le processus achats dans un grand groupe. Non seulement je faisais des missions « techniques », mais j’avais aussi tout l’aspect management/efficacité via les KPI à penser et à mettre en place.
Ce type de stage est très intéressant sur un CV : vos futurs recruteurs savent que vous pouvez réaliser des missions opérationnelles tout en étant sensibilisé aux besoins du top management. Combiné à une expérience internationale, c’est un véritable tremplin et une forte valeur ajoutée.
Tes heures de travail ?
Au Japon, nous travaillions 40 heures par semaine. Mes horaires de base étaient donc 9 h-18 h avec une pause d’une heure pour manger le midi. Mitsubishi FUSO est vraiment une excellente entreprise où travailler car vous avez des horaires flexibles. Dans mon cas, j’ai préféré travailler de 7 h du matin à 16 h : je pouvais profiter de la fin d’après-midi pour découvrir Tokyo. De plus, si vos missions vous amenaient à faire des heures supplémentaires, vous deviez alors les récupérer en heures de repos avant la fin du mois. Par exemple, si vous faites du 9 h-20 h le lundi, vous avez deux heures de repos à prendre, vous pourrez donc faire 9 h-16 h le lendemain.
Ta rémunération ?
J’étais payé 130 000 yens par mois (1000 € net environ).
Que retiens-tu de positif dans ton stage ?
J’ai eu la chance d’avoir un manager excellent. Mon L3 (rang hiérarchique managérial) a très vite compris que j’adorais l’autonomie et les responsabilités. Il me donnait donc souvent des missions avec des deadlines parfois courtes en me disant « peu m’importe comment et quand tu le fais, tant que tu l’as fini pour cette date ». J’avais donc énormément d’autonomie, la confiance de mon manager et – de ce fait – pas mal de pression. Son management correspondait parfaitement à mes attentes. De plus, j’ai toujours adoré les KPI : savoir ce qui compte pour le management et le top management est très stratégique. Vous saurez alors dans votre vie future comment travailler et quels résultats fournir pour contenter ces deux catégories.
J’ai aussi pu renforcer mes compétences opérationnelles en réalisant des missions clés pour le département achats. J’insiste vraiment sur ce duo stratégie/opérationnel car c’est, selon moi, une des principales forces de mon stage.
Au niveau culturel, j’ai eu la chance d’évoluer dans un milieu à la diversité incroyable. Il y avait certes une majorité de Japonais mais j’avais des collègues indiens, américains, européens, chinois, coréens, vietnamiens et d’autres nationalités ! J’ai donc pu apprendre des cultures de chacun, même si c’est principalement la façon de vivre japonaise que j’ai pu découvrir.
Le Japon est-il à ce point différent de la France ?
Les cultures japonaise et française sont réellement différentes.
Au niveau professionnel, les Japonais sont bien plus serviables que les Français : dès que vous avez besoin d’aide, ils sont là pour vous. Ils sont vraiment très attachés à leur entreprise (tous venaient habillés avec la tenue Mitsubishi FUSO) et ils ne comptent pas leurs heures. Ils donnent leur maximum pour l’entreprise et sont très fiers d’en faire partie. Souvent, ils y restent longtemps. Je n’étais pas dans une entreprise traditionnelle japonaise : mes managers étaient choisis selon leurs performances. Dans les entreprises classiques, c’est l’ancienneté qui vous fait évoluer hiérarchiquement.
Cependant, il est vrai que les Japonais ont du mal à dire « non ». Il faut donc identifier quand ils vous répondent favorablement par politesse ou quand ils sont vraiment aptes à faire ce que vous demandez. En effet, ils auront du mal à reconnaître qu’ils ne savent pas faire quelque chose ou qu’ils n’ont pas le temps de le traiter.
Ils sont très fiers de leur efficacité professionnelle : leurs moyens de transport ne sont jamais en retard, vous êtes servis rapidement au restaurant…
Au niveau personnel, j’ai aussi adoré leur façon de vivre : les Japonais sont tout le temps respectueux. Il y a peu de poubelles à Tokyo (mégalopole de 30 millions d’habitants) : ils ramènent leurs déchets chez eux et font le tri sélectif (sept poubelles différentes). Dans le métro, les Japonais sont silencieux pour ne pas gêner leurs voisins.
Il est vrai qu’il leur faut un peu de temps pour vous accepter, mais une fois que c’est fait, ils sont ravis de vous faire découvrir toute leur culture. J’ai ainsi eu la chance de faire Hanami (cérémonie pour célébrer l’arrivée des sakuras [fleurs de cerisiers]) avec mes collègues, c’était un moment très fort. Au Japon, vous mangez souvent dehors (ramen shops/sushi shops par exemple) et leur gastronomie est vraiment excellente !
J’ai eu la chance d’être invité par mon manager et par un collègue à manger avec leurs compagnes. Cela m’a permis de découvrir des spécialités japonaises. C’était un véritable honneur : les Japonais le font rarement.
Ce stage t’a-t-il donné des idées pour la suite ?
À l’heure où sera publié cet article, j’aurai sûrement terminé la partie théorique de mon Master 2. J’ai eu beaucoup de chance en intégrant TBS : l’ambiance et la vie associative sont vraiment top et l’école vous accompagne énormément dans vos projets personnels, même s’ils sont atypiques.
Dès janvier, j’effectuerai mon stage de fin d’études au sein de mon entreprise, pouvant ainsi enfin vivre l’entrepreneuriat à 100 % ! Pour l’instant, c’est une entreprise de services, mais je réfléchis à développer une activité qui serait en partie en France et en partie au Japon. Peut-être dans l’import/export au vu de ma spécialité académique, à réfléchir !