Le groupe Casino, qui détient aussi des enseignes telles que Monoprix, croule aujourd’hui sous une dette qui s’élève à plus de 6 milliards d’euros. Afin de redresser la société, deux offres s’affrontent : celle du trio Niel, Pigasse et Zouari ainsi que celle proposée par Daniel Kretinsky et Marc Ladreit de Lacharrière.
Le groupe Casino endetté à plus de 6 milliards d’euros
Accumulée depuis des années, le groupe se retrouve aujourd’hui étranglé par sa dette. Son endettement net se chiffre au total à 6,4 milliards d’euros, notamment lié au rachat de plusieurs enseignes telles que CDiscount ou Monoprix. Celui de la maison mère, Rallye, s’élève à environ 3 milliards d’euros. Rallye est également accusé d’avoir trompé ses investisseurs en 2019, affirmant que la situation de ses liquidités était solide alors qu’elle était en réalité très fragile. Le groupe a ainsi écopé d’une amende de 2,75 millions d’euros de la part de l’AMF.
Casino s’est donc récemment lancé dans une procédure de conciliation, afin de renégocier sa dette et de trouver une solution à l’amiable avec ses créanciers, qui sont notamment des banques telles que le Crédit Agricole ou la BNP. C’est un enjeu de taille pour le marché français. Le groupe Casino, c’est pas moins de 9 000 magasins qui emploient plus de 50 000 salariés dans l’Hexagone, sur les 200 000 employés à travers le monde. Un grand changement s’annonce dans le groupe, puisque la maison mère Rallye devrait probablement perdre le contrôle de Casino. Entre rachat et vente à la découpe, les employés sont inquiets, que ce soit pour leurs conditions de travail mais également leur poste, bien qu’aucun plan de licenciement n’ait pour l’instant été évoqué.
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Intermarché récupère près de 120 magasins Casino
119 magasins Casino vont passer sous le giron d’Intermarché. Le changement est imminent puisque près de la moitié d’entre eux changeront dès la fin de l’année 2023, les autres d’ici 3 ans. Cette démarche s’inscrit dans la stratégie de croissance du Groupement les Mousquetaires, qui possède les magasins Intermarché.
Cette centaine de magasins cédés à Intermarché est un poids en moins pour Casino. Néanmoins, cette transaction va certes réduire les pertes et renflouer les caisses du groupe endetté. Cependant, ce n’est pas suffisant, d’où la nécessité d’avoir de nouveaux investisseurs.
Ce transfert concerne 4 000 salariés, qui affichent au premier abord une certaine inquiétude. Ils craignent en effet des conditions de travail dégradées. Bien que ce soit obligatoire étant donné la taille de l’entreprise, les magasins Intermarché n’ont pas de Comité social et économique (CSE), une instance représentative du personnel qui traite des questions relatives aux salaires, à la protection sociale et plus largement à l’application du code du travail. La politique sociale dépendant de chaque patron de magasins, les 4 000 salariés seront néanmoins transférés avec leur niveau d’ancienneté ainsi que leur salaire.
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Les deux offres principales pour le rachat de Casino
Le trio Niel, Pigasse et Zouari s’imposait comme le grand favori
D’un côté, le patron de Free s’est associé à Matthieu Pigasse, associé de Lazard et actionnaire du groupe Le Monde, ainsi qu’à Moez-Alexandre Zouari, actionnaire de la société Picard Surgelés. Les trois hommes d’affaires se sont regroupés sous un véhicule d’investissement, 3F Holding, qui prévoit d’investir 450 millions d’euros de fonds propres. Il faut ajouter à ce montant 450 millions d’euros sous forme de dette, qui permettront de s’aligner sur les 900 millions d’euros nécessaires au redressement de la société.
Au vu de la solidité projet industriel, ce trio avait réussi à convaincre les créanciers de Casino. Ils revendiquent notamment la touche française du projet, puisque leur société sera immatriculée en France, ce qui permettra notamment de conserver le siège à Saint-Étienne, un enjeu majeur pour les salariés. D’autre part, Jean-Charles Nouari, actuel PDG de Casino, continuera à jouer un rôle au sein du groupe, ce qui peut faire pencher la balance en faveur de cette proposition.
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Daniel Kretinsky et Marc Ladreit de Lacharrière, une proposition financière solide
Face à eux, l’homme d’affaire tchèque, Daniel Kretinsky, s’est associé à la 28e fortune française pour acquérir le groupe Casino. Les deux milliardaires proposent de renflouer les caisses à hauteur de 1,8 milliard d’euros, une première grosse différence avec la proposition du trio Niel, Pigasse et Zouari. Ils apporteront 900 millions à eux deux afin de détenir la moitié des parts de Casino. Les créanciers de Casino, des banques et fonds d’investissement, sont invités à investir à leurs côtés afin de compléter cette somme.
Ces deux offres présentées du lors du Comité interministériel de restructuration financière au ministère de l’Économie ce mardi, les deux parties disposaient de quelques jours pour peaufiner leurs offres. Le duo de milliardaires doit renforcer l’aspect industriel de sa proposition, alors que le trio 3F est appelé à consolider le volet financier.
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Casino : le duel remporté par le duo Kretinsky-Ladreit de Lacharrière
Le duo Kretinsky-Ladreit de Lacharrière est désormais seul en lice, suite à l’annonce récente du retrait du trio Niel-Pigasse-Zouari. Le trio a notamment dénoncé un duel biaisé, critiquant un parti pris pour les deux hommes d’affaires.
Le conseil d’administration souhaite donc continuer avec les deux hommes d’affaires ainsi qu’Attestor, un hedge fund. L’offre a donc été légèrement révisée, ce nouveau trio apportera 925 millions d’euros, ce qui lui permettra de détenir 53% de Casino. Les créanciers sont invités à compléter les 275 millions restants, afin d’apporter 1,2 millard d’euros au capital, contre 1,8 milliard auparavant. Les échéances concernant le recouvrement de la dette de 6,4 milliards d’euros ont aussi été revues, afin de ramener la dette à 1,2 milliard fin 2024.
Les promesses sociales semblent quant à elle en bonne voie pour être tenues. Le maintien du siège social à Saint-Étienne est toujours d’actualité et aucune suppression d’emplois n’est évoquée. Au contraire, le groupe espère même pouvoir en créer, un engagement qui s’aligne avec les intentions du ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, qui avait indiqué qu’il veillerait à l’avenir des salariés français du groupe.
L’accord de l’administration permet donc de poursuivre les discussions. Le nouveau trio a maintenant pour objectif d’entrainer les créanciers dans le projet d’ici fin juillet.