Vous le savez peut-être, mais le début de l’année Pré-Master à l’ESSEC Business School suit un format un peu particulier… Les quatre premiers mois forment une transition entre la classe préparatoire et l’école de commerce, pour le meilleur (et pour le pire ?). Ainsi, il n’y a pas de « cours » à proprement parler avant le mois de novembre ! Le temps est occupé par des conférences, des séminaires, des bootcamps, que les étudiants trouvent d’ailleurs plus ou moins intéressants.
L’administration travaille étroitement avec les étudiants pour améliorer ces séminaires année après année, notamment leurs représentants au Comité d’Enseignement. Il y a également une initiation au monde professionnel par deux biais : l' »Expérience terrain », un stage ouvrier de quatre semaines, et « Going Pro », un stage de shadowing de quatre jours pendant lequel l’étudiant suit le manager de son choix (ou le manager qui a bien voulu l’accueillir, soyons honnêtes).
Dans cet article, je vais vous parler de l’Expérience Terrain. Ou plutôt de MON expérience de l’Expérience Terrain – il paraît que c’est mal vu de faire des généralités. Accrochez-vous, vous allez rire !
Le principe
Commençons par la base. Le principe, le fonctionnement, tout ce qu’on nous demande de savoir lorsqu’on arrive à l’ESSEC. Si je tombe dans la démagogie, je vous parle immédiatement des objectifs pédagogiques du programme « Expérience d’une organisation » dont fait partie l’Expérience Terrain affichés fièrement dans le document de cours (puisqu’il y a un document de cours). Attention, PIPOTRONIC !
« L’Expérience d’une Organisation a trois grands objectifs. Le premier concerne l’apprentissage (apprendre à apprendre). […] Plus précisément, le programme EO contribue à développer la capacité à apprendre de ses expériences, en mobilisant ses capacités d’observation, ses émotions et ressentis et sa réflexivité. […] Les deux autres objectifs concernent le développement de connaissances et de compétences associées, plus spécifiquement développer la connaissance, la compréhension et la capacité d’analyse des phénomènes organisationnels à partir de ses propres expériences, en portant une attention particulière à la complexité du monde social et du monde du travail ».
Concrètement, cela se traduit par un stage de quatre semaines dans une organisation, suivi d’un rapport de stage. L’organisation doit être obligatoirement partenaire de l’ESSEC ; le responsable pédagogique du programme débloque ainsi 600 places en stage un peu partout en France, ce qui devrait être largement suffisant pour 400 étudiants. Cela pose néanmoins quelques problèmes dont je vous parlerai ci-dessous, un peu de patience !
Trois types de stages sont possibles en théorie : travail d’exécution en industrie, dans la grande consommation, dans la restauration ou l’hôtellerie ; travail social et éducatif d’insertion (associations d’aide, de solidarité, de réinsertion) avec ou sans logement sur place ; travail dans le domaine de la santé, du handicap, de la vieillesse ou de la toxicomanie.
L’attribution des stages
Premier évènement qui a fait grincer des dents au moins 50% des étudiants : l’attribution des stages. Puisque les organisations sont « imposées », nous avions un forum pour les découvrir et se faire une idée des tâches qui nous attendaient. Nous devions ensuite remplir un questionnaire dans lequel nous devions spécifier quatre voeux qui nous intéressaient (en les diversifiant au maximum pour avoir une chance de les avoir), les lieux où nous pouvions nous loger, si nous acceptions d’être logés sur le lieu du stage, et autres renseignements du type permis, voiture, etc. Nous pouvions également spécifier si nous favorisions le lieu du stage ou le type d’expérience. Ensuite, les responsables du programme récoltaient toutes les informations et constituaient les affectations.
Dire qu’il y a beaucoup de déçus serait un euphémisme. Le groupe de promotion se transforme en véritable foire et c’est à qui postera le plus de messages pour échanger son expérience terrain. Car oui, nous avons une semaine pour échanger nos stages. Malheureusement, ces échanges ne sont possibles que deux à deux. Autrement dit, il est presque impossible de le changer.
Mon Expérience Terrain
Ça y est, nous arrivons au moment tant attendu… Le récit de mon stage terrain ! Je fais partie des déçus des attributions de stage. Je favorisais la localisation du stage, à Lyon, notamment pour raisons de santé. Trois de mes voeux étaient pour du travail d’exécution dans des magasins, l’autre était une association. J’ai eu une association. À Avignon. Bon. Ça commençait bien. Ça m’a quand même posé quelques soucis d’organisation, mais passons.
Tous les jours, nous devons tenir un journal de bord : une page par jour sur du travail d’exécution / travail ouvrier. Ah. On se demande quand même ce qu’on va bien pouvoir raconter. Mais on y arrive, vraiment. On écrit sa petite page chaque jour. Pour le meilleur, et définitivement pour le pire. « Faits, analyses, ressentis » : voilà les consignes. À la fin de la première semaine, nous devions rendre la première partie. La seconde partie est à rendre à la fin du stage. Je vous propose de découvrir le mien, j’espère que vous allez vous régaler.
J1 : A la fin de la journée, je suis très fatiguée. Pourtant, je n’ai pas l’impression d’avoir fait grand-chose.
J2 : Début de journée un petit peu chaotique : je ne savais pas où je devais me rendre le matin : si j’allais travailler au magasin toute la journée ou si j’allais dans une autre antenne/un autre relais. Finalement, je me suis présentée, comme le jour précédent, au magasin, et j’ai commencé à y travailler, en préparant notamment le petit-déjeuner pour les visiteurs.
J3 : Il y a eu beaucoup de périodes de flottement dans la journée, où je n’avais rien à faire, jétais assise en salle de pause et personne ne pouvait me confier des tâches. La prise d’initiatives est difficile puisque je ne connais rien au fonctionnement de l’association ni ses besoins spécifiques. De plus, nous devons adopter une posture « humble ».
J4 : J’ai l’impression d’avoir perdu mon temps en me levant ce matin.
J5 : Un camion vient récupérer les sacs de vêtements usagés pour les recycler. Chaque jour, il repart plein. Chaque jour, il reste encore des sacs après son passage. Et de nouveaux sont ajoutés tout au long de la journée. C’est une tâche sans fin qui s’apparente à celle du mythe de Sisyphe … et il est difficile d’imaginer Sisyphe heureux.
J6 : Début de journée aussi calme que le précédent. Avant de commencer à travailler, il y a toujours le cérémonial du thé et du café du matin : tous ceux qui arrivent disent bonjour à tout le monde, se servent un thé ou un café et s’installent autour de la table.
J7 : J’ai utilisé un massicot pour la première fois aujourd’hui, j’ai déchiré les feuilles. Bravo.
J8 : Là, j’ai dû relever une Mission Impossible digne des meilleurs agents du MI6 : fusionner deux cartons pleins en un seul carton. Même en étant, en toute modestie, une professionnelle du Tetris, je n’ai malheureusement pas réussi.
Vous voyez le genre du rapport, même si je ne vous ai mis que 8 jours sur 17.
Malgré tout, et malgré ce que vous venez de lire, je dois rendre justice au programme. Même si j’étais très sceptique sur ce stage ouvrier au départ, je suis finalement très contente de mon expérience, et quitter les locaux de l’ESSEC pour quatre semaines était une bonne chose. Si le contenu du stage en lui-même n’est pas palpitant, les rencontres que j’ai faites ont été particulièrement enrichissantes – et non, ce n’est pas de la langue de bois pour conclure mon rapport de stage !