Syntec Conseil, le syndicat professionnel représentant du secteur du conseil qui regroupe 250 cabinets, a dévoilé mardi 2 novembre, pour la 10e année consécutive, la nouvelle édition de son étude annuelle, Accélérer. Zoom sur les résultats de cette étude, destinée aux prochains dirigeants du pays, qui a forcément comme un goût de la Présidentielle 2022.
Cette 11e édition de l’étude Accélérer a été préfacée par Jacques de Larosière, qui a occupé de nombreuses fonctions prestigieuses dans le milieu bancaire dans le pays (gouverneur de la Banque de France, président de la direction générale du Trésor, etc.). Il souligne notamment la dégradation de la compétitivité des entreprises françaises et résume en quelques lignes les recommandations détaillées dans l’étude.
Par ailleurs, Jacques Larosière explique le but ultime de cette édition : « Il serait hautement souhaitable que ce recueil facilite le débat public et nourrisse la campagne présidentielle. » Il souligne également la clarté et la facilité de compréhension de son contenu : « Je défie quiconque de prétendre que « Accélérer » est abscons. Il est d’une clarté lumineuse. Chacun d’entre nous peut comprendre l’importance des enjeux et donc mûrir sa propre décision. Dans un pays démocratique, un débat sérieux devrait être organisé pour poser les problèmes, et tracer les pistes pour notre avenir et celui des générations à venir. »
Lire aussi : Comment les cabinets de conseil apprivoisent-ils le monde post-Covid ?
Tout savoir sur la 11e édition de l’étude annuelle « Accélérer » destinée à la Présidentielle 2022
L’étude annuelle de Syntec Conseil, « Accélérer », détaille 35 propositions pour redresser la compétitivité française. Grâce à cet ouvrage, l’organisation s’inscrit depuis 2011 au cœur du débat public sur le thème de la prospérité future du pays.
Comment est réalisée l’étude de Syntec Conseil ? « Accélérer » a été étayée par un sondage réalisé par l’institut BVA auprès de 500 membres d’équipes dirigeantes de sociétés de toute taille et de tout secteur, et le pilotage d’une dizaine de patrons de cabinets de conseil, à l’image d’Olivier Marchal, le président de Bain à Paris, et Jean-Marie Hennes, executive vice-président de Mars & Co. Leur approche se base également sur des analyses macroéconomiques et des comparaisons internationales, ainsi qu’un diagnostic et des recommandations établies sans parti pris idéologique et dans l’intérêt des clients et du pays.
L’objectif premier est de faire la promotion de ces mesures de compétitivité et de faire passer le message auprès du plus grand nombre de candidats à la Présidentielle 2022.
Afin d’alimenter le débat et d’atteindre les ambitions de compétitivité, « Accélérer » est divisée en trois grands blocs : une partie réaffirmant que la compétitivité est la clé de la prospérité, une autre mettant en avant les atouts et les faiblesses de la France et de ses entreprises et, enfin, des propositions de pistes pour améliorer la compétitivité de la France lors du prochain quinquennat
Un déclin de compétitivité non-négligeable en France
En 2000, la compétitivité des entreprises françaises dépassait celle de l’Allemagne, y compris pour des indicateurs tels que la balance commerciale ou le déficit public. Le magazine The Economist titrait en 1999 « L’Allemagne, homme malade de l’Euro ». La France s’en sortait très bien à cette époque, mais les quinze années qui suivaient ont été marquées par une détérioration rapide.
De 2000 à 2015, la compétitivité française a commencé à se dégrader d’année en année, rattrapée par un certain nombre de forces de gravité : l’impact des 35 heures, la montée régulière de la dépense publique combinée avec la préférence française pour la ponction sur les entreprises, un droit du travail lourd et inflexible, une bureaucratie restée complexe et pesante, etc. Entre temps, d’autre pays, à l’image de l’Allemagne, ont mis en place des réformes audacieuses, leurs permettant de booster leur compétitivité.
« Accélérer » : Les trois moteurs de croissance à mobiliser pour booster la compétitivité en France
Les analystes ont identifié trois moteurs de croissance et ont fait des propositions pour atteindre les objectifs fixés dans les années à venir :
- L’industrie : Ramener l’industrie manufacturière de 10% à 13% du PIB, tout en concentrant les investissements dans les filières stratégiques de demain. Ils recommandent également d’accélérer la mutation technologique vers l’industrie 4.0 et de créer un ministère de l’Industrie élargi pour piloter ce chantier avec une administration dédiée.
- L’innovation : Fixer l’objectif de 3% du PIB de dépenses en R&D d’ici 2027 et investir dans les infrastructures technologiques clés (réseaux, cloud, cybersécurité, etc.). Les spécialistes recommandent également de moderniser les grands organismes de recherche publique.
- La croissance responsable : Fixer un plan de financement clair pour sécuriser l’objectif de neutralité carbone 2050, investir sur les filières de la transition environnementale, y compris sur la filière nucléaire, introduire de nouveaux mécanismes de soutien comme le CIR Vert ou le suramortissement pour les investissements de transition énergétique et, enfin, pousser les réformes structurantes au niveau européen.
Lire aussi : Les cabinets de conseil à la conquête des labels RSE
Les quatre piliers pour relancer la compétitivité française selon Syntec Conseil
Dans un contexte marqué par les effets de la crise sanitaire et la prise de conscience générale des enjeux environnementaux, le prochain quinquennat devra mettre la compétitivité au coeur de ses priorités pour réactiver et amplifier les efforts déjà entrepris. Pour ce faire, il devra se focaliser sur les quatre piliers suivant :
Lever les freins à la compétitivité
- Assurer et pérenniser la baisse de l’IS à 25%
- Baisser de 15 milliards d’euros supplémentaires les impôts de production
- Continuer à baisser le coût du travail, y compris sur les emplois qualifiés, par un plafonnement des charges patronales, et envisager l’instauration d’une TVA sociale
- Renforcer les fonds propres des entreprises via la poursuite du « Label Relance », la mise en place de prêts participatifs et la création d’un fonds de rendement dédié aux PME et ETI
- Amplifier les efforts initiés sur le front des compétences par le soutien à la formation professionnelle et à l’apprentissage
- Alléger la bureaucratie, en accentuant notamment les efforts de simplification et de digitalisation de l’administration
Améliorer l’efficacité de la dépense publique
- Ramener le niveau des dépenses publiques sous la barre des 50% du PIB à 5 ans
- Mettre en place une gouvernance rigoureuse et des règles budgétaires strictes appliquées à toutes les administrations
- Réduire le gaspillage et les fraudes avec la création d’une « task force » interministérielle chargée d’éliminer les dépenses injustifiées dans un délai contraint et suivre les résultats à chaque trimestre
- Engager une réflexion stratégique pour recentrer et prioriser les missions de service public
- Entreprendre un vaste chantier de simplification à tous les étages en supprimant des échelons territoriaux et en réorganisant les administrations centrales
- Accélérer la modernisation du management et des outils de gestion publique
Restaurer la confiance
- Actionner 4 leviers pour améliorer la confiance dans le pays et les institutions : donner le cap, communiquer régulièrement, faire participer et améliorer la régulation des réseaux sociaux
- Augmenter la partage de la valeur et le rôle des salariés dans la gouvernance des entreprises
- Renforcer le dialogue avec les partenaires sociaux en favorisant une meilleure représentativité des syndicats et un taux de syndicalisation plus élevé
- Faciliter les passerelles entre institutions publiques et entreprises privées
Pour Syntec Conseil, ces enjeux devront faire partie intégrante de la réflexion et de l’action publique dès les premiers mois et pendant toute la durée du quinquennat, avec une vision stratégique de long terme.
Les recommandations des experts seront-elles prises en compte lors de la Présidentielle 2022 ?
Un grand nombre de personnes se poseront forcément la question : « est-ce vraiment le rôle des consultants d’apporter leur avis sur des questions économiques ? » La réponse est oui, selon Olivier Marchal, le président de Bain à Paris. Il explique au site Consultor : « Le plus souvent, ceux qui poussent des idées le font avec des intérêts catégoriels. C’est une différence avec l’étude du Syntec qui vise à défendre l’économie française au sens large : les PME, les grands groupes, les start-up… Les consultants en stratégie sont les meilleurs experts de la compétitivité des entreprises qu’ils connaissent mieux que quiconque. À ce titre-là, leur parole dans le débat public a de la valeur. »
Les recommandations proposées par Syntec Conseil ont été appliquées à hauteur de 60% au cours du quinquennat d’Emmanuel Macron. « Ce n’est évidemment pas que grâce à nous, mais nous y contribuons », poursuit Olivier Marchal.