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Classement d’écoles de commerce : comment transformer les palmarès en 2021 ?

Il y a quelques semaines, nous évoquions la fin des classements d’écoles. Si la réponse à cette question volontairement provocante est bien évidemment négative, un autre sujet émerge, celui de la transformation des classements. Comment faire pour réaliser des palmarès plus pertinents ? Les business schools françaises et la Conférence des Grandes Écoles se penchent sur cette question depuis déjà plusieurs mois.

 

Transformer les classements d’écoles de commerce ? Pour beaucoup d’observateurs, c’est un impératif absolu. En effet, chaque classeur a pour désir d’améliorer au maximum la pertinence de son palmarès, un passage obligé pour se différencier de ses pairs. Ainsi, nombreux sont les journalistes qui, dans leurs classements, jouent avec les critères et le poids qu’ils accordent à ces derniers dans l’optique de concevoir un palmarès unique.

Si cette démarche est entamée du côté des écoles et des classeurs, la réalité des faits est beaucoup plus complexe. Les écoles sont confrontées à la multiplication des classements, ce qui induit un agacement chez les étudiants et alumni qui sont moins nombreux à répondre aux questionnaires, introduisant ainsi des biais évidents de ces mêmes classements. En outre, certains critères sont trop difficilement mesurables et de nombreuses business schools plaident pour une modification de ces derniers.

 

Des critères jugés peu pertinents par les écoles

De nombreuses écoles se posent des questions sur les critères choisis par les classeurs. « Le fait de prendre en compte l’activité Twitter d’un établissement doit-il être déterminant dans le classement de celui-ci ? Si on donne la taille du réseau d’alumni sans ramener celle-ci au nombre d’étudiants présents dans l’école, est-ce que c’est pertinent ? », s’interroge le DG d’EM Strasbourg, Herbert Castéran.

Quelques établissements indiquent entre autres que certains paramètres, comme le nombre de publications scientifiques de rang A, ne sont pas déterminants lorsque les étudiants recherchent une école et qu’ils nuisent à la mission finale que remplissent les palmarès, à savoir guider les élèves dans leur orientation. De nombreux classements internationaux se sont dispensés de la mesure de ce critère. Désormais, le Financial Times, dans la confection de son palmarès des meilleures écoles de commerce d’Europe, n’accorde aucun crédit au nombre de publications de recherche. Dans ses classements dédiés à certains programmes, comme les MSc en finance ou les PGE, le média britannique s’intéresse uniquement au nombre d’enseignants-chercheurs dotés d’un Ph. D.

Autre problématique dans la construction des classements : l’émergence de nouveaux palmarès qui se basent sur des metrics que les écoles n’ont pas forcément à leur disposition. Conséquence : certains établissements ne peuvent être classés les premières années ou se retrouvent parfois à des places qui sont éloignées de la réalité. « L’un des objectifs de la commission classement de la CGE est de travailler les journalistes pour réaliser les meilleurs classements. Cependant, certains médias demandent des données sur lesquelles nous n’avons pas d’indicateurs. C’est à ce moment que le dialogue doit s’établir avec les journalistes pour qu’ils comprennent que nous ne sommes pas l’INSEE et que nous devons travailler ensemble pour collecter des données qui sont pertinentes pour les lecteurs », indique Corinne Faure qui pilote la commission classement CGE. « C’est utile d’avoir ce dialogue pour préciser des questions méthodologiques et amener les journalistes à comprendre comment cela se passe sur le terrain », complète Elsa Opitz, également à la tête de la commission classement de la CGE.

En réalité, la réalisation d’un classement d’écoles de commerce en France est à ce jour très complexe. Les données sont fournies par les écoles, les étudiants et/ou les alumni. Ainsi, le journaliste se doit de collecter les datas, puis de les analyser et d’en retirer les éléments saillants lui permettant de réaliser son palmarès. Un problème se pose : actuellement, rien n’empêche les business schools d’embellir certaines informations, comme le nombre de professeurs enseignant au sein du PGE. Rien ne permet non plus d’assurer un taux de fiabilité de 100% dans les données récoltées par les classeurs. La commission classement de la CGE se positionne ainsi comme la pierre angulaire garante de la fiabilité des classements et des données fournies par les écoles.

Classement d’écoles de commerce : Quand la CGE s’en mêle

En échange permanent avec les classeurs, la Conférence des Grandes Écoles, via sa commission classement, travaille donc sur les méthodologies, les questionnaires, mais aussi sur un nouveau projet qui pourrait grandement réduire la marge d’erreur des palmarès : la mise en place une base de données. En effet, fort de l’émergence de nombreux classements et de la redondance des questionnaires, la CGE entend mettre en place une plateforme qui offrirait « un set d’informations, permettant aux journalistes de les travailler ensuite », précise Elsa Opitz.

Cette idée émane d’une initiative similaire portée depuis plusieurs années par la CTI (Commission du titre d’ingénieur). « Aujourd’hui, les questionnaires se rejoignent sur beaucoup de thématiques. L’idée était de constituer une base de données unique dans laquelle les écoles rentrairaient leurs informations une fois par an, comme nos accréditations. L’objectif est de faciliter le travail des écoles, mais aussi des journalistes », détaille Marion Rodier, membre de la commission classement. « Cela va également nous permettre de dialoguer avec les journalistes pour trouver de nouveaux critères pertinents qui pourront refléter au mieux la réalité des écoles, comme l’innovation académique et pédagogique, une notion qui ressort avec le coronavirus », complète Corinne Faure.

Concrètement, la CGE travaille avec les classeurs depuis 2018. Le dialogue ouvert entre la commission classement et les écoles de commerce a permis de résoudre les diverses problématiques rencontrées ces dernières années par les classeurs. Ce travail a notamment été nécessaire en cette période de crise qui change complètement la donne pour les écoles. « Nous avons anticipé les problématiques que nous pouvions rencontrer cette année. La Covid a totalement remis en cause les critères liés à l’international. Cependant, notre objectif n’est pas de montrer un désaccord envers un classement ou de changer sa méthodologie, mais de travailler avec les journalistes sur les points d’achoppement qu’ils peuvent rencontrer. Ils sont très ouverts à la proposition de nouveaux indicateurs et sont les premiers à nous dire qu’une certaine partie des critères ne prend pas forcément en compte la réalité au sein des business schools », indique Marion Rodier.

 

L’émergence de nouveaux classements d’écoles de commerce

Un des axes de transformation des classements est la création de nouveaux palmarès thématiques dédiés à l’international, à l’entrepreneuriat, comme le palmarès d’Up2School ou même à la dimension développement durable, comme le classement du Figaro Étudiant.

Ces palmarès semblent être appréciés par les écoles, dans la mesure où ils renversent l’ordre établi des classements qui placent toujours les mêmes business schools en première position. « Faire un classement sur le thème de la RSE, par exemple, c’est intéressant. Il s’agit du reflet d’une vraie tendance de fond qui n’est pas juste une lubie. Cela peut vraiment faire bouger les lignes », se réjouit Céline Davesne, DGA Programmes et International de NEOMA Business School. Cependant, là encore, la question des critères et de leur pertinence se pose pour beaucoup d’écoles. Certains évoquent le manque de recul sur des sujets qui empêchent d’avoir une vision complète d’un sujet qui est en train de se mettre en place dans les Grandes Écoles.

D’autres critiquent des palmarès réalisés sur des critères qui ne dépendent pas des écoles elles-mêmes, comme l’international, une dimension fortement impactée par le coronavirus. « L’international est une donnée importante pour les étudiants. Malheureusement, nous constatons qu’avec la situation, toutes les écoles ont dû mettre un bémol sur ce sujet, depuis le mois de mars, que ce soit du côté des échanges, comme pour le recrutement d’étudiants internationaux. Il faut donc faire attention à ne pas créer des classements qui sont tributaires de facteurs que personne ne maîtrise », observe Bruno Ducasse, DG de MBS.

Si la majorité des écoles de commerce s’accorde à dire que ces classements sur des critères spécifiques sont une bonne chose, certaines d’entre elles insistent à nouveau sur la multiplication des classements qui peuvent poser problème pour les étudiants. « Aujourd’hui, nous demandons de plus en plus aux élèves de divulguer des informations personnelles dans le cadre des classements et cela comporte des risques, notamment au niveau du RGPD », s’inquiète Renata Morneau, du département classements, accréditations et qualité d’ESCP Business School. Un sujet qui inquiète tant les écoles que la commission classement de la CGE. En effet, aujourd’hui, il est devenu nécessaire de faire un travail de prévention auprès des écoles pour rassurer sur l’utilisation des données et leur stockage.

 

La recette gagnante des classements internationaux

Pour autant, dans l’esprit des business schools, si les palmarès nationaux sont un passage obligé malgré les problématiques rencontrées ces dernières années, ceux qui sont devenus incontournables sont réalisés par les médias anglo-saxons. Pourquoi trouvent-ils grâce aux yeux des écoles de commerce ? Pour leur rayonnement tout d’abord ! « Comme nous avons de fortes ambitions de développement à l’international, les classements internationaux prennent de plus en plus de place et nous y sommes très attentifs », explique Céline Davesne.

En effet, l’international est devenu un axe de développement de toutes les écoles de commerce qui cherchent à se positionner dans un paysage ultra-concurrentiel. « Le marché français est dense et complexe, mais nous ne sommes que 38. Sur la sphère internationale, personne ne nous connaît et nous nous retrouvons face à des mastodontes qui sont plus grands ont plus de moyens. Ne pas être classé à l’international, c’est ne pas exister à l’étranger », réagit Élian Pilvin, DG d’EM Normandie.

La méthodologie de ces classements anglo-saxons est également appréciée par les Grandes Écoles de commerce françaises. « Il y a un travail de recherche. Les palmarès sont construits atour de de données spécifiques et ne se contentent pas que du déclaratif comme les salaires de sortie. Il y a également un travail de vérification et d’enquête à proprement parler », constate Herbert Castéran. « Le FT ou The Economist sont des classements très sérieux qui se focalisent surtout sur les résultats à la sortie de l’école comme le taux d’employabilité, la progression de salaire, etc. Ce sont des critères qui sont au cœur des missions de l’école ! », complète la DGA Programmes et International de NEOMA.

Sont-ils pour autant exempts de toute critique ? La réponse est bien évidemment négative et, là encore, certains se plaignent d’augmentation de salaire de sortie faramineuse de certaines écoles d’une année sur l’autre. Cependant, la question qui se pose sur la transformation des écoles de commerce, même si elle apparaît aujourd’hui comme nécessaire et est acceptée par tous les acteurs, est celle du parti pris des écoles et des journalistes. Bien évidemment, la subjectivité est présente des deux côtés, même si certains médias essaient de s’en affranchir.

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