Yvon Chouinard, fondateur de Patagonia, a annoncé avoir pris la décision de léguer la totalité de son entreprise au bien commun. Déjà connu pour ses prises de position en faveur de l’environnement, son action est inédite dans l’histoire des États-Unis pour une entreprise valorisée à trois milliards de dollars. Dans un monde où la cause climatique devient un sujet de préoccupation pour tous, c’est un geste fort, qui pourrait en amener d’autres.
Don de Patagonia : un choix fort et réfléchi
En accord avec sa femme et ses deux enfants, Yvon Chouinard a expliqué, dans une lettre ouverte, avoir transféré 100% des parts de Patagonia à un trust chargé de respecter les valeurs écologiques prônées par la marque, et à diverses associations de protection de l’environnement, qui bénéficieront désormais des profits engrangés par l’entreprise.
“La Terre est notre unique actionnaire”, c’est la phrase qui résume sans doute le mieux les raisons de ce choix. Devant la crise climatique que nous traversons, il souhaitait s’investir davantage dans ce combat vers un monde plus vert. Plusieurs options s’offraient à lui :
- Vendre Patagonia et redistribuer l’intégralité de l’argent généré par cette vente à des associations, mais cela n’offrait aucune garantie sur le maintien des valeurs véhiculées par l’entreprise sur le long terme.
- Une entrée en bourse a été étudiée, mais, là aussi, l’idée a vite été abandonnée, car même les entreprises ayant les meilleures intentions du monde font le choix du gain à court terme plutôt que de penser responsabilité et croissance à long terme.
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Yvon Chouinard : Un fondateur au parcours atypique
“Je n’ai jamais souhaité devenir entrepreneur. J’ai débuté en tant qu’artisan et fabriquais du matériel d’escalade pour mes amis et moi-même avant de me lancer dans le textile. » Voilà comment a débuté la carrière d’Yvon Chouinard dans le vaste monde du textile. Alpiniste expérimenté qui a passé sa jeunesse à gravir les flancs des montagnes du parc national du Yosemite, en Californie, il a commencé, au début des années 60, à fabriquer ses propres pitons, objet indispensable dans la pratique de l’escalade.
Yvon Chouinard fonde alors Patagonia en 1973 et commence par commercialiser des habits pour la montagne, rien de révolutionnaire jusque-là. Il s’est vite rendu compte que dans un climat froid et humide, la laine devenait trop lourde et peu isolante. Il décide donc d’utiliser un nouvel alliage pour créer un nouvel habit que nous connaissons tous : la polaire. Plus légère, et capable de sécher rapidement, ses attributs conviennent parfaitement aux climats montagnards.
Son chiffre d’affaires grimpe de manière fulgurante mais Yvon Chouinard se retrouve confronté à une nouvelle problématique : continuer à développer son activité au détriment de la planète ou devenir un acteur majeur de la lutte contre le réchauffement climatique. Il n’a pas hésité et s’est empressé de commencer la lutte à travers plusieurs prises de position. Incorporation du coton biologique et du polyester recyclé dans la fabrication de ses produits, campagnes publicitaires engagées, l’entreprise est, depuis les années 90, une référence dans l’engagement écoresponsable.
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Comment Patagonia va-t-elle fonctionner ?
Aucune des solutions déjà existantes ne lui convenant, Yvon Chouinard a donc décidé d’en inventer une qui est résumée en une phrase : “Plutôt que d’extraire des matériaux naturels afin d’enrichir nos investisseurs, nous utiliserons la richesse créée par Patagonia pour protéger la source de toute cette richesse.”
Si la marque de vêtements était déjà engagée depuis longtemps dans ce combat en reversant chaque année 1% de ses ventes, un tournant s’opère désormais. La totalité de ses actions avec droit de vote sont transférées à une fiducie afin de protéger les valeurs de sa société ; 100% des actions sans droit de vote sont transférées à des ONG protégeant la nature et combattant la crise environnementale.
La famille d’Yvon Chouinard continuera d’orienter les décisions du trust et Patagonia fonctionnera comme une entreprise classique, avec un conseil d’administration et un directeur général. Les fonds récoltés après avoir effectué les investissements nécessaires à la pérennité de l’entreprise seront redistribués et financeront la lutte contre la crise environnementale.
Yvon Chouinard a fait le choix de privilégier la cause environnementale, au détriment de sa fortune personnelle, une prise de position qui fait réfléchir et, espérons, fera des émules auprès d’autres grandes entreprises.
