A l’ère des #BalanceTonPorc et #MeToo, de l’émergence des comptes instagram féministes et de l’instauration d’un quota de femmes pour les conseils d’administration, la question de l’égalité homme-femme au sein des entreprises revient sur le devant de la scène.
Une étude de l’observatoire SKEMA sur la loi Copé-Zimmermann
Aujourd’hui, une femme gagne en moyenne 9% de moins qu’un homme, toutes choses étant égales par ailleurs (poste, taille de l’entreprise, compétences, diplôme…). Mais l’inégalité ne s’arrête pas là, elle s’exprime aussi dans le (faible) pourcentage de femmes accédant aux postes à hautes responsabilités.
Pour lutter contre cela, la loi dite Copé-Zimmermann a été promulguée en 2011. Elle oblige les entreprises de plus de 500 salariés et de chiffre d’affaires supérieur à 50 millions d’euros à intégrer au moins 40% du sexe sous-représenté (les femmes en l’occurrence) au conseil d’administration. Le non-respect de ce quota engendre des sanctions telles que la nullité des nominations non-conformes mais aussi l’interdiction de verser des jetons de présence. Ceux-ci valaient, en 2013, environ 3 500€ par séance (moyenne effectuée sur 37 groupes du CAC 40) et constituent ainsi un revenu non négligeable pour les administrateurs. Ce quota est devenu obligatoire dans tous les conseils d’administration à compter du 1er janvier 2017.
L’observatoire SKEMA de la féminisation des entreprises travaille depuis 2007 sur les questions liées aux inégalités homme-femme au sein de soixante grands groupes : CAC 40 et CAC next 20. Ils ont notamment évalué les conséquences de cette loi et d’autres index, afin de mesurer les avancées des plus grandes entreprises dans ce domaine.
L’imposition de quotas, une mesure à double tranchant
Si de nombreux conseils d’administration se sont pliés à la règle du quota, d’autres la contournent aisément.
A l’instar des évadés fiscaux, on parle alors d’évadés sociaux : LafargeHolcim en Suisse ne possède qu’à peine 8,33% de femmes dans son CA. Ce pays a également été choisi par STMicroeletronics qui, avec ses 30% de femmes, reste loin du compte. On retrouve également Airbus (16,67%) et Gemalto (27,27%) aux Pays-Bas, ainsi que ArcelorMittal au Luxembourg (33,33%) et TechnipFMC au Royaume-Uni (21,43%). Ces six entreprises sont les plus éloignées des 40% demandés par le gouvernement.
On peut également souligner que même si le quota est atteint dans la plupart des conseils d’administration, il n’est que très rarement dépassé. La moyenne de femmes siégeant aux CA de ces soixante entreprises avoisine les 40,18%.
Une représentation encore limitée au sein des ComEx
Alors que l’instauration d’un quota au sein des conseils d’administration a eu un impact bénéfique sur la mixité de ces derniers, les comités exécutifs restent trop souvent inégalitaires. Au premier janvier 2018, seulement 13,69% de femmes figuraient au sein de ceux-ci.
Pourtant, ce n’est pas faute d’avoir sous la main de potentielles candidates : en moyenne au sein des entreprises du CAC 40 et CAC next 20, ce sont 32,33% des cadres de sexe féminin. Et c’est traditionnellement dans cette population que les entreprises piochent leurs dirigeants.
Les femmes ont plus de difficultés que les hommes à accéder aux postes à hautes responsabilités. La notion de plafond de verre se retrouve dans cette étude : pour 36,86% de femmes employées au sein des entreprises, elle ne sont que 32,33% à endosser un rôle de cadre. Néanmoins l’observatoire SKEMA met également en avant un second plafond de verre, plus compliqué à franchir : celui entre la position de cadre et l’intégration du comité exécutif avec un écart de 18,64 points entre les deux pourcentages.
Une seule entreprise a cinq femmes dans son ComEx (L’Oréal, sur 16 membres, plus le président) alors qu’elles sont 14 à n’en avoir aucune et 19 à en avoir qu’une seule.
Pour résoudre cela, l’observatoire propose l’instauration de quota pour le ComEx, puisque la présence grandissante de femmes au sein du conseil administration ne contribue pas à relever le pourcentage de femmes au ComEx (aucune corrélation n’a pu être démontrée).
L’index d’inégalité
Afin de mesurer le taux d’inégalité au sein de chaque entreprise, l’observatoire SKEMA calcul le plafond de verre supérieur (entre le pourcentage de cadres femmes et le nombre de femmes présentent au ComEx.
Cette étude permet aussi de constater une bipolarisation des entreprises : on observe clairement une tendance masculine et une tendance féminine. Danone, qui possède 49% de femmes cadres et peut se targuer d’avoir 42% de femmes au ComEx fait figure d’exemple dans le domaine.
Néanmoins ces résultats doivent être étudiés au regard d’autres critères puisqu’une bonne performance en matière d’index d’inégalité peut être obtenue par des entreprises qui possèdent dans les deux cas (cadres & ComEx) de faibles pourcentages de femmes. C’est le cas de LafargeHolcim, possédant le plus bas taux de femmes présentes au conseil d’administration mais dont l’index d’inégalité est de -2,22.
La féminisation des entreprises, un facteur de productivité et de réussite ?
Après le fond Happy@Work géré par Sycomore, qui mise sur les entreprises où les employés sont les plus heureux, place au Femina Index 10 et 15. Cet indice boursier investit exclusivement dans les entreprise du CAC 40 où l’encadrement est le plus féminisé sachant qu’un minimum de 40% est nécessaire pour y figurer.
Le Femina Index 15 se compose de : Accor, Axa, Natixis, BNPParibas, Danone, Hermès, L’Oréal, LVMH, Sodexo, Kering, Gecina, Teleperformance, Sanofi, Société Générale, CreditAgricole.
Concernant ses performances, le Femina Index surpasse largement son indice de référence, le CAC40.
Quoi qu’on en pense, cet index montre que même avec un grande proportion de femmes au sein des entreprises, la productivité n’est pas en berne ! Les quotas ont certes permis aux entreprises d’intégrer plus de femmes au sein des conseils d’administration mais il reste à déterminer si cette mesure part d’un bon sentiment ou est réalisée uniquement sous la contrainte. Et de en matière d’égalité des sexes, il reste un long chemin à parcourir… #BonneJournéeInternationaleDesDroitsDesFemmes