La business school NEOMA et l’école d’ingénieurs Arts et Métiers ParisTech ont sorti un livre blanc qui réalise un focus sur les métiers de demain et les mutations rencontrées dans les entreprises. Un sujet souvent évoqué dans les médias, c’est le fameux chiffre des 85% ! En effet, d’après certains experts, plus de quatre métiers sur cinq de 2030 n’existent pas encore. Cette donnée est-elle vraisemblable ou exagérée ? Delphine Manceau, DG de NEOMA, et Laurent Champaney, DG d’Arts et Métiers ParisTech, nous expliquent tout sur leurs recherches.
Tout d’abord, pourriez-vous revenir sur l’impact des livres blancs ? À quoi servent-ils ?
Delphine Manceau : Le livre blanc a pour but de provoquer une réflexion sur un sujet, en interrogeant des experts et en comparant des points de vue. L’idée est vraiment de générer le débat autour d’un ou plusieurs enjeux. C’est pour cette raison qu’il était intéressant de réaliser ce livre blanc avec une école totalement différente de la nôtre.
Laurent Champaney : Cela permet d’avoir un ensemble de points de vue différents sur un sujet. L’objectif est d’avoir des témoignages issus de profils provenant d’horizons divers. C’est aussi un moyen pour les étudiants de confronter leurs avis sur une problématique donnée.
Beaucoup évoquent les fameux 85% de métiers de 2030 qui n’existent pas encore aujourd’hui. Comment peut-on identifier les métiers de demain ?
L.C. : Nous sommes en interaction permanente avec les milieux socio-économiques et les entreprises, via nos anciens étudiants, mais aussi nos partenaires. Cela fait partie de nos missions et cela nourrit nos étudiants, leur permettant d’avoir une transition douce vers la vie professionnelle grâce aux stages et à l’alternance que nous proposons avec ces sociétés. Et c’est avec ces échanges que nous comprenons aussi les besoins des entreprises et la mutation des métiers.
D.M. : Le chiffre de 85% éveille les consciences et c’est l’objectif que nous poursuivons avec ce livre blanc. Notre but n’est pas d’avoir une photographie précise des métiers de demain. Les entreprises sont en constante évolution et cela s’accélère avec l’intelligence artificielle. C’est pour cela qu’il faut développer de nouvelles compétences chez nos étudiants, pour les préparer aux métiers qu’ils exerceront tout au long de leur carrière. Notre mission n’est pas de les préparer pour une fonction exercée à un instant T, mais pour l’ensemble des métiers qu’ils feront tout au long de leur parcours.
L.C. : Aujourd’hui, ce processus de transformation des métiers est encore très long dans les entreprises. C’est pour ça que nous nous focalisons sur les compétences plus que les fonctions.
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Avez-vous constaté un effet coronavirus sur les entreprises, lors de l’élaboration de ce livre blanc ?
D.M. : Nous observons un effet d’accélération sur différents sujets comme la digitalisation ou l’environnement. La crise liée au coronavirus n’a pas radicalement bouleversé les tendances qui existaient déjà avant, mais en a accéléré certaines.
L.C. : C’est d’ailleurs un phénomène que l’on vit dans nos écoles. J’ajouterai que la crise a balayé beaucoup de certitudes. C’est un grain de sable qui a arrêté l’économie et qui a permis aux entreprises de réaliser que certaines compétences sont essentielles, comme l’agilité.
En définitive, quelles sont les compétences dont le monde aura besoin demain pour faire face à ces mutations ?
D.M. : Aujourd’hui, pour moi, ce qui va façonner les transformations de l’entreprise et des métiers, ce sera la data, l’environnement, le digital, le distanciel et la question de l’éthique. C’est pour cela que les compétences de demain seront avant tout l’agilité, la résilience, la capacité d’innovation, la créativité ou encore la capacité à travailler avec des gens d’horizons différents. Je crois énormément en cette capacité. Il ne faut pas cumuler toutes les compétences, mais les managers de demain devront être capables de travailler et de parler avec des collaborateurs issus formations différentes.
L.C. : Cela transforme nos cursus. Avant, chez les ingénieurs, nous avions pour habitude de transmettre une « boîte à outils » qui dotait les étudiants des compétences scientifiques et techniques nécessaires. C’est terminé ! Désormais, il faut se focaliser sur des notions comme l’agilité. Les nouvelles technologies évoluent tous les six mois. Cette agilité devient donc nécessaire pour les comprendre et les intégrer.
D.M. : En effet, il faut qu’on forme des diplômés qui continuent à apprendre tout au long de leur vie. Le livre blanc comporte une partie sur la société apprenante. Apprendre à apprendre, c’est devenu vital !
Pour retrouver le livre blanc et les conclusions de l’étude, rendez-vous ici !